Un protocole sur les femmes et les jeunes sera négocié et adopté dans le cadre de l’accord sur la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Gerhard Erasmus et Trudi Hartzenberg de TRALAC expliquent pourquoi un tel protocole est nécessaire, ce qu’il devrait prévoir et comment il pourrait être mis en œuvre. Les objectifs exacts de ce protocole ne sont pas encore clairs.

Un protocole de la ZLECAf sur les femmes est non seulement judicieux, mais il s’agit également d’un instrument indispensable. Il peut aborder des questions très pratiques liées au commerce et des défis persistants dans le contexte du commerce informel et formel en Afrique, en plus de fournir des réponses aux défis auxquels sont confrontées les femmes commerçantes dans de nombreux pays et régions du continent. Ces problèmes sont systémiques et ne peuvent être résolus par des efforts nationaux non coordonnés. Nous pensons qu’il devrait y avoir un instrument juridique dédié à la ZLECAF avec un objectif spécifique (obligations pour les États parties) et des dispositions institutionnelles adaptées.

Une autre raison de suggérer cette approche est que le conseil habituel selon lequel les gouvernements africains doivent mettre en place des politiques qui suppriment les contraintes auxquelles les femmes sont confrontées en tant que commerçantes ne va pas assez loin. Le commerce est par nature une affaire interétatique. Les difficultés rencontrées par les femmes impliquées dans le commerce transfrontalier doivent être abordées dans le cadre d’un effort continental concerté et d’un arrangement juridique approprié. La ZLECAF est la plateforme évidente pour ce faire ; elle serait incomplète sans un protocole sur les femmes dans le commerce.

Lorsque la ZLECAF disposera d’un tel protocole, il sera possible d’aligner les mesures et politiques nationales des États parties et de tirer dans la même direction. Un engagement global à l’échelle du continent permettra de donner la priorité à la mise en œuvre des obligations visant à aider les femmes commerçantes de manière ciblée. Les communautés économiques régionales (CER), qui continueront à fonctionner une fois que la ZLECAf sera opérationnelle, participeront alors à cette entreprise. C’est tout à fait nécessaire; l’essentiel du commerce intra-africain de marchandises continuera à se faire dans le cadre des accords de libre-échange des CER. Ils sont les éléments constitutifs de la ZLECAF, comme le stipule l’article 5(b) de l’accord de la ZLECAF.

Dans cette perspective, on ne voit pas très bien pourquoi les besoins des femmes commerçantes devraient être négociés en même temps que ceux de la jeunesse africaine. La jeunesse africaine est confrontée à de nombreux défis différents et uniques, parmi lesquels le chômage et le manque d’éducation sont les plus graves. La plupart de leurs problèmes (et les réponses requises) ne sont pas directement liés au commerce, du moins pas au sens où on l’entend dans le contexte de la ZLECAF. Une meilleure gouvernance commerciale n’est pas le point de départ des politiques liées à la jeunesse; pour les femmes commerçantes, elle l’est. Les objectifs généraux de la ZLECAF sont, entre autres, de créer un marché unique pour les biens et les services, facilité par la circulation des personnes, afin d’approfondir l’intégration économique du continent africain, et de promouvoir et de réaliser un développement socio-économique durable et inclusif, l’égalité des sexes et la transformation structurelle des États parties (article 3 de l’accord de la ZLECAF).

Les négociations en cours pour l’adoption de protocoles supplémentaires de la ZLECAF au cours de la phase III offrent l’opportunité de négocier un protocole spécifique sur les femmes dans le commerce en Afrique.

Sur quoi devrait porter un protocole de la ZLECAF sur les femmes dans le commerce?

Une partie de la réponse réside dans le fait qu’il devrait aborder les défis persistants auxquels sont confrontées les femmes dans le commerce et fournir des solutions en termes de meilleure gouvernance des frontières et de facilitation du commerce. Et il devrait y avoir des institutions continentales et nationales adaptées pour mettre en œuvre les obligations, éliminer les dysfonctionnements généraux et contrôler le respect des règles. Les problèmes rencontrés par les femmes commerçantes ne sont pas seulement une autre manifestation des barrières non tarifaires (BNT); ils sont de nature systémique.

En 2013, la Banque mondiale a publié une étude montrant que les femmes jouent un rôle important dans le commerce en Afrique. Elles font du commerce transfrontalier, produisent des produits, y compris des denrées alimentaires, qui peuvent être exportés, et possèdent et gèrent des entreprises orientées vers le commerce. Mais elles sont confrontées à des contraintes spécifiques qui nuisent à leurs activités économiques, à l’accès aux informations techniques et aux finances, et sont souvent victimes de harcèlement et d’extorsion à la frontière.

Les problèmes rencontrés par les femmes commerçantes ne sont pas seulement une autre manifestation des barrières non tarifaires; ils sont de nature systémique.

Les femmes se voient plus facilement refuser l’accès aux principaux réseaux commerciaux et aux informations sur les procédures pertinentes. Les mesures commerciales fastidieuses et les exigences documentaires pèsent plus lourdement sur les femmes. Elles sont moins en mesure que les hommes d’obtenir les intrants et les matériaux qui augmenteraient leur productivité et leur permettraient d’être plus compétitives sur les marchés étrangers.

Cette situation est importante non seulement en raison de l’impact négatif sur les familles, mais aussi parce qu’il est essentiel de faciliter le rôle des femmes dans le commerce si l’on veut que l’Afrique réalise son potentiel en matière de commerce à l’intérieur de ses propres frontières et avec le reste du monde. La réalisation de ce potentiel commercial contribuera à une meilleure sécurité alimentaire, à la création d’emplois essentiels et à la réduction de la pauvreté.

 

Lire:

Rôle des syndicats dans l’élaboration de la politique commerciale – Aperçu du lien entre le commerce, l’agenda du travail décent de l’OIT et l’Agenda 2030 pour le développement durable: Implications pour les femmes et les jeunes.

 

Vous pourriez aimer:

Faire en sorte que la ZLECAf soit bénéfique pour les femmes

TRALAC

Le Trade Law Centre NPC (TRALAC) renforce les capacités liées au commerce en Afrique, en aidant les pays à améliorer la gouvernance commerciale et les processus politiques inclusifs afin de garantir que le commerce contribue aux résultats du développement durable.

Principales Ressources

Pays Présentés

Aperçu

Liens Utiles