Les résultats d’une enquête menée à N’Djamena, Abéché et Moundou révèlent les défis et les opportunités liés à la création d’emplois décents dans le cadre de l’adhésion du Tchad à la ZLECAf.

 

La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) est sur le point de remodeler la dynamique commerciale sur l’ensemble du continent africain. Un rapport sur l’impact de la ZLECAf au Tchad a examiné comment la mise en œuvre de la zone de libre-échange interagira avec la structure productive de la nation d’Afrique centrale et les flux commerciaux avec ses partenaires, ainsi que les implications pour les travailleurs et les syndicats.

Les informations sur le marché du travail proviennent d’une enquête menée dans trois villes clés du Tchad : N’Djamena, Abéché et Moundou. La couverture géographique de l’enquête reflète la diversité de l’économie tchadienne.

N’Djamena, la capitale, est l’épicentre de l’application du droit du travail et abrite de nombreuses entreprises formelles et activités syndicales. Abéché, qui est proche des frontières du pays avec la Libye et le Soudan, est une plaque tournante du commerce transfrontalier et de la migration de la main-d’œuvre. Enfin, Moundou, la capitale économique du Tchad, concentre de grandes unités manufacturières et le secteur agricole.

L’enquête a porté sur 688 personnes travaillant dans les secteurs privé, public et indépendant. L’enquête a porté sur les personnes ayant un emploi et sur celles ayant quitté leur emploi au cours des six derniers mois.

Structure de l’économie avant et après l’ère pétrolière

 Avant-pétrole                                                                                                    Après-pétrole

Source: Analyse des effets de la zone de libre-échange du continent Africain (ZLECAf) sur les conditions de vie et de travail au Tchad

Résultats de l’enquête

Liberté d’association et droits syndicaux

Le taux de syndicalisation est faible. Sur les 688 personnes interrogées, seules 42 % ont déclaré appartenir à un syndicat, tandis que 27 % ont fait état d’une présence syndicale sur leur lieu de travail. Certains travailleurs ne connaissent pas les syndicats ou ne sont pas intéressés par leur adhésion, ce qui suggère un problème de communication. Notamment, seuls 11 % des personnes interrogées, dont la majorité sont des employés du secteur public, ont participé à des activités syndicales au cours des six derniers mois. Un nombre important de personnes interrogées (467 sur 688) estiment qu’elles ont le droit de revendiquer les droits du travail et le font par divers moyens, notamment par des lettres aux employeurs, des grèves et des négociations.

Respect des droits fondamentaux des travailleurs

Quinze personnes interrogées ont déclaré avoir été harcelées au cours des six mois précédant l’enquête en raison de leur participation à des activités syndicales. Ce harcèlement, qui se traduit notamment par des menaces et des intimidations, a principalement touché les personnes ayant fait des études supérieures et travaillant dans le secteur public ou dans le secteur des services. Les travailleurs et les membres vulnérables des syndicats ont besoin d’une meilleure protection.

Conditions de travail et qualité du travail

Environ 4 % des personnes interrogées ont admis qu’elles n’étaient pas satisfaites de leur emploi actuel et qu’elles n’avaient pas de meilleures opportunités. Cette insatisfaction est plus marquée chez les personnes les plus instruites et celles qui travaillent dans le secteur primaire, ce qui suggère la nécessité d’améliorer les perspectives et la qualité des emplois dans le pays.

Proportion de personnes ayant une rémunération inférieure au SMIG
Source: Analyse de l’impact de la zone de libre-échange continentale africaine sur les conditions de vie et de travail au Tchad

Gestion des conflits au travail

Des conflits liés au travail ont été signalés par 4,8 % des travailleurs interrogés, la plupart d’entre eux étant liés à l’interprétation des contrats. Il est encourageant de constater qu’avec une intervention minimale de l’inspection du travail, 90,9 % de ces conflits ont été résolus à l’amiable.

Les accidents du travail ont été identifiés comme une source importante de conflit, affectant 7,6 % des personnes interrogées. Toutefois, la protection des travailleurs peut être améliorée, car seuls 44,2 % de ces accidents sont couverts par l’employeur.

Inspection du travail et relations industrielles

Les difficultés rencontrées par l’inspection du travail entravent l’application du droit du travail. Les inspecteurs du travail sont confrontés à un certain nombre de difficultés, notamment des visites irrégulières sur les lieux de travail en raison d’un manque de personnel, de moyens de transport inadéquats et de pressions politiques. Plusieurs mesures, notamment une meilleure coordination, des mécanismes de contrôle, un statut spécial pour les inspecteurs, un soutien logistique et financier et le respect de la convention 81 de l’OIT, peuvent améliorer l’efficacité de l’inspection du travail. Les inspecteurs recommandent davantage de conseils aux deux parties et des mesures proactives pour anticiper et traiter les conflits potentiels afin d’améliorer les relations sur le lieu de travail.

Alors que le Tchad cherche à saisir les opportunités offertes par le ZLECAF, il doit donner la priorité au travail décent et au renforcement d’un dialogue social inclusif pour permettre un plaidoyer efficace des syndicats sur les questions commerciales.

Les organisations de travailleurs doivent protéger les droits des travailleurs et garantir des pratiques de travail équitables. Malgré les difficultés rencontrées, notamment le faible taux de syndicalisation et les lacunes en matière de communication, la détermination des travailleurs à défendre leurs droits est évidente. La qualité des emplois, la protection des travailleurs et la réforme de l’inspection du travail sont autant de domaines qui requièrent une attention particulière. Alors que le Tchad cherche à saisir les opportunités offertes par la ZLECAF, il doit donner la priorité au travail décent et au renforcement d’un dialogue social inclusif pour permettre un plaidoyer efficace des syndicats sur les questions commerciales.

 

Ressource essentielle: Analyse de l’impact de la zone de libre-échange continentale africaine sur les conditions de vie et de travail au Tchad

Lire:

Organisation Syndicale des Travailleurs d’Afrique Centrale note de position syndicale

 

 

Dr Aristide Mabali

Dr Aristide Mabali est un économiste et chercheur affilié à l'Union des syndicats du Tchad.

Principales Ressources

Pays Présentés

Aperçu

Liens Utiles